Biologie - Mars 1990
C'est vers l'espace que les grandes entreprises pharmaceutiques regardent aujourd'hui pour tenter de déchiffrer les structures du vivant à partir desquelles il vont fabriquer de nouveaux médicaments.
C'est une des plus étonnantes applications de la microgravité qui règne dans les navettes spatiales. L'histoire des médicaments montre que leur découverte a souvent été le fruit du hasard ou de l'observation de pratiques millénaires. On connait les célèbres histoires de la penicilline et des moisissures ou de l'aspirine et de l'écorce de bouleau. Aujourd'hui les entreprises pharmaceutiques cherchent à mettre au point des médicaments sur mesure. C'est ce qu'on appelle la conception rationnelle de médicaments. Un élément essentiel de cette stratégie est la connaissance des récepteurs protéiques, sortes d'antennes placées sur les cellules qui captent des informations et conditionnent l'activité des cellules vivantes. De telles informations circulent dans le corps sous la forme de molécules-messagers, par exemple des hormones. Un médicament efficace peut consister en une copie modifiée d'une hormone jouant un rôle d'analogue ou d'antagoniste et prenant sa place sur un récepteur. Il faut au préalable dresser la carte moléculaire de ces récepteurs pour fabriquer à coup sûr les molécules qui vont s'y fixer. Comme une clé reconnue par une serrure. Seulement voilà, une telle analyse nécessite des cristaux de protéines extrèmement purs qu'il est très dificile de fabriquer dans les laboratoires taditionnels. D'où l'énorme intérêt porté aujourd'hui par les entreprises pharmaceutiques à la fabrication dans les navettes spatiales des cristaux de protéines de ces fameux récepteurs biologiques. En l'absence de gravité, les cristaux sont en effet plus gros et mieux formés. Tous les grands sont sur le sujet : Merck, Bristol Myers Squibb, Upjohn, Abott aux Etats-Unis, et en France Roussel-Uclaf, Sanofi, Rhone-Poulenc.