Les réseaux maillés auto-organisés ou mesh networks
Chapitre 4, p. 124
Un mesh network, ou réseau maillé, est un réseau de télécommunications sans fil auto-organisé. À la différence d’un réseau Wifi, qui nécessite une connexion chaque fois que l’utilisateur se tient hors de portée d’un hot spot, le réseau maillé assure le relais entre différents nœuds de manière totalement transparente pour l’utilisateur. Un nœud peut être un smartphone, un ordinateur portable, une console de jeux vidéo ou tout système informatique capable de détecter la Wifi et de la renvoyer. De tels réseaux sont utilisés depuis assez longtemps, notamment aux États-Unis ; ils l’ont d’abord été par les militaires, puis dans le civil, particulièrement dans les situations de catastrophe lorsqu’il s’agit de coordonner les opérations de sauvetage de la police, des pompiers, des ambulanciers ou de tout autre service de secours. En effet, le réseau de communication peut se constituer sur le terrain par auto-organisation et en utilisant les relais existants grâce à des logiciels spécialisés.
En 2006, dans La Révolte du pronétariat, je signalais l’émergence et l’importance des mesh networks, que je considérais comme un véritable bouleversement technologique parallèle à Internet : « Mais l’avenir appartient aussi à ce que l’on appelle les “réseaux pervasifs” et aux mesh networks. […] Ce réseau […] s’auto-organise, de manière analogue à la formation de synapses entre les neurones[1]. » Le livre faisait également référence à un pionnier de ce type de réseaux, Rafi Haladjian, fondateur d’Ozone.net, pour qui « le réseau pervasif est un réseau omniprésent[2] », toujours ouvert et assurant une permanence de la connexion en tout lieu. Il permet de connecter tout type d’appareil et se présente donc comme l’infrastructure appropriée à l’émergence des objets intelligents. Le réseau maillé contribue au développement d’un écosystème informationnel d’interactions homme/homme, homme/machine et machine/machine. Une vision prémonitoire du cloud computing d’aujourd’hui.
Le réseau maillé s’inscrit en cela dans la tendance générale de l’informatique répartie sur des ensembles hétérogènes : cloud, grid computing, Web services, etc. Il est le réseau de la continuité et de la permanence de la communication. Le socle d’une informatique répartie, dans laquelle les objets sont interdépendants. L’utilisateur ne doit plus avoir à changer de « prothèse numérique » lorsqu’il passe le pas de sa porte. Par conséquent, l’usage du réseau maillé ne doit représenter qu’un coût modique, le coût de chaque transaction étant imperceptible pour l’utilisateur. Récemment, grâce à un financement du gouvernement américain soutenu par OTI (Open Technology Initiative) et à des équipes d’universitaires, on a vu apparaître le projet Commotion, qui permet de créer un réseau sans fil gratuit, parallèle à Internet et sans contrôle industriel ou étatique possible. L’objectif initial était d’offrir à des dissidents politiques la possibilité de communiquer entre eux lorsque les réseaux Internet avaient été coupés par l’État.
[1] . Joël de Rosnay, avec Carlo Revelli, La Révolte du pronétariat, op. cit.
[2] . Rafi Haladjian, « Le rêve d’Ozone », http://www.ozone.net/reve.html.