Matériaux nouveaux - Mai 1991
Un des vieux rêves des biologistes est de fabriquer des textiles naturels en se passant des plantes, des insectes ou des animaux qui fournissent la fibre. Ce rêve est désormais une réalité grâce à un tour de force réalisé par une équipe de chercheurs de l'Université du Texas : la production de coton en tube à essai.
Le coton représente aujourd'hui près de 45% des textiles dans le monde, mais sa culture exige des surfaces et une main d'oeuvre importants, un climat et une météo favorables. Le Pr Goodin et son équipe ont réussi à cultiver des cellules du plant de coton provenant de tiges, de racines, de feuilles et de fruits dans un milieu nutritif artificiel. Il se développe progressivement une sorte de masse indifférenciée appelée un cal que l'on place dans un milieu liquide contenant un mélange de sucre brut, de sels minéraux et d'hormones. On voit alors les cellules s'allonger en formant des fibres de coton identiques à celles que l'on collecterait normalement sur les plants en culture dans les champs. Ce coton de laboratoire insensible aux variations climatiques et aux pénuries de main d'oeuvre présente de nombreux avantages. On pourrait par exemple fabriquer directement dans un milieu stérile des bandages et des pansements pour les hôpitaux et les cabinets médicaux. Le coton en tube à essai peut aussi révolutionner l'industrie textile en facilitant la production de fibres ayant une longueur et une épaisseur uniforme, ce qui renforce la résistance et la qualité du tissus. Encore plus curieux, on pense déjà à fabriquer des billets de banque en papier de coton que les faussaires ne pourront jamais copier car ces fibres possèdent une structure spécifique facile à identifier. Les chercheurs veulent adapter déjà ces techniques à d'autres organismes vivants. La laine et la soie en tube à essai ne sont plus très loin !