Par Pierre-Antoine Merlin (DSI).
En matière d'appropriation du savoir, internet change tout. C'est la thèse d'un livre agaçant, parfois, limpide et didactique, toujours.
Depuis trente ans, Joël de Rosnay s'est fait une spécialité de décrypter et d'analyser les mouvements de mode économiques, scientifiques et sociétaux. Son dernier opus, justement intitulé La révolte du pronétariat, n'échappe pas à cette règle. On y trouve des aperçus fulgurants qui enchanteront les uns, et des raccourcis saisissants qui agaceront les autres. D'autant que l'auteur n'oublie jamais de se citer, de crainte, sans doute, que son influence ne soit minorée par ses contemporains.
Parmi ses apports les plus probants : la description minutieuse de ces " usagers, internautes, blagueurs, citoyens comme les autres, mau qui entrent de plus en plus en compétition avec les infocapitalistes traditionnels ". Une thèse qui trouve son aboutissement lorsque Joël de Rosnay renvoie à une déclaration prémonitoire du fondateur de Netscape. " Le vrai défi d'internet n 'est pas d'envoyer des informations à des internautes, mais de répondre à leurs demandes personnalisées. L'avenir du réseau repose sur sa capacité à faire remonter et à prendre en compte le gigantesque feed-back d'internet. " Ce qui n'est pas sans danger pour les professions de l'information : comment séparer le bon grain de l'ivraie, sur une Toile en expansion continue ? Comment faire le départ entre la communication, la rumeur, le vrai et le faux, le gratuit et le payant, le fiable et le fantaisiste ? Le parti-pris de Joël de Rosnay, comme presque toujours, est optimiste. Question de caractère, sans doute. Mais aussi une interprétation plausible des mouvements qui animent les promesses de la blogosphère. Cet examen ne fera pas taire les critiques.
D'aucuns gloseront sur la tendance de l'auteur à survoler ses sujets sans craindre redites ni approximations.
Reste que la mise à disposition de réflexions certes éparses, mais souvent pertinentes, sur le monde qui vient est un service public qui s'ignore.